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« L'enjeu pour nous, anciens commissaires-priseurs judiciaires, est de continuer à se distinguer dans cette profession commune. »

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« L'enjeu pour nous, anciens commissaires-priseurs judiciaires, est de continuer à se distinguer dans cette profession commune. »
« L'enjeu pour nous, anciens commissaires-priseurs judiciaires, est de continuer à se distinguer dans cette profession commune. »

Commissaires-priseurs + huissier de justice = commissaires de justice ? Que l’on soit bon en maths ou non, il s’agit d’une opération qui mérite que l’on s’y attarde. Artus de Lamberterie et Charles Baboin-Jaubert, commissaires-priseurs chez Audap & Associés nous offrent une lecture décomplexifiée de ce que sera l’avenir des deux métiers dans la nouvelle profession de commissaire de justice entrée en vigueur le 1er juillet 2022.

Quelles sont les conséquences de cette réforme sur le métier de commissaire-priseur et sur l’impact en termes de formation des étudiants ?

Artus : Ce n’est pas la première fois qu’une réforme survient dans notre métier, je pense notamment à la loi du 10 juillet 2000 sur la réglementation des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques qui nous a poussés à devenir à la fois des opérateurs de ventes volontaires et des officiers ministériels. Aujourd’hui, c’est encore autre chose. Le commissaire de justice porte la double casquette du commissaire-priseur et de l’huissier de justice. C’est donc l’ouverture de notre métier à une toute autre profession.

Charles : Le recours à l'interprofessionnalité répond à la volonté aujourd’hui de simplifier le droit et les professions. Dans le cas d’une fusion, le changement premier s’opère au niveau des études. Hier, un commissaire-priseur devait obtenir un diplôme de droit et un diplôme d'histoire de l'art. Aujourd’hui, après un master de droit, il devra passer un examen auprès de l’Institut national de formation des commissaires de justice et suivre ensuite une formation théorique et un stage professionnel pendant deux ans.

Comment passe-t-on de commissaire-priseur à commissaire de justice et quels sont les enjeux et les opportunités pour votre profession ?

Artus : L’objectif est de faire fusionner les deux métiers rapidement et efficacement. Les commissaires-priseurs, tout comme les huissiers de justice, ont jusqu’à 2026 pour se former sur leurs nouvelles attributions. Dans cette phase de transition, les formations d’accès à la profession vont être amenées à évoluer pour permettre la meilleure acclimatation possible de part et d’autre. La réalité est que l’on compte aujourd’hui entre 400 et 600 commissaires-priseurs pour plus de 3 000 huissiers. L'enjeu pour nous, anciens commissaires-priseurs judiciaires, est de continuer à se distinguer dans cette profession commune.

Charles : Même si cette réforme répond à une demande des huissiers, elle n’en est pas moins une opportunité économique pour les commissaires-priseurs. Les deux professions, actuellement, ne sont pas sur le même niveau de rentabilité et cette fusion participe d’un renouveau économique.

Comment le métier de commissaire-priseur - commissaire de justice aujourd’hui - a-t-il évolué ? En quoi le métier est-il attractif pour les jeunes ?

Charles : Les commissaires-priseurs ont pris très tôt le virage de la digitalisation avec les premières ventes à distance il y a déjà dix ans, les premières plateformes de ventes online sans commissaire-priseur et sans marteau. Les objets vendus ont aussi considérablement évolué. Qui aurait imaginé que l’on vendrait aux enchères des sneakers, des cartes Pokémon ou encore des objets de pop culture ? Un confrère a récemment réalisé une vente Batman ! L’ouverture exceptionnelle du marché de l’art a offert un nouveau souffle à la profession et donc aussi de nouvelles opportunités. Nous sommes loin de l’image traditionnelle du commissaire-priseur vendant des commodes du XVIIIème siècle ! Même si nous sommes évidemment toujours des acteurs passionnés des ventes de tableaux et mobilier classique, le métier a considérablement évolué, avec des enchères sur des objets insolites mais aussi bien-sûr avec l’arrivée des NFT et les premières ventes entièrement dématérialisées.

Artus : Nous avons la chance d’avoir une profession qui est naturellement en lien avec son époque. Les ventes aux enchères sont souvent le reflet de l’évolution de la société. Par exemple, aujourd’hui, nous notons une réelle volonté des vendeurs et des acquéreurs de donner une seconde vie aux objets qui s’inscrivent dans un usage quotidien ce qui donne lieu à des ventes que nous n’aurions pas imaginé organiser auparavant. Par ailleurs, la réforme permet à la profession d’étendre son champ de compétence, un atout supplémentaire pour des jeunes qui souhaitent rejoindre une profession variée et dynamique.

Est-ce qu’un commissaire-priseur a autant de bénéfices à retirer de cette fusion qu’un huissier de justice ?

Artus : Nous sommes aujourd’hui acteurs de deux professions très différentes à l'origine et chacune a une formation très complète. Concernant le métier de commissaire-priseur, une étude approfondie de l’histoire de l’art est indispensable au même titre qu’il est important d’acquérir un sens de l’objet. C’est un métier de passion. Il faut apprendre à regarder un objet, à le comprendre, ça ne s’invente pas. Du côté des huissiers, nous rencontrons donc des confrères qui ne se sentent pas à l’aise à l’idée d’exercer un métier auquel ils n’ont pas été formés. Même si pour le moment, nous sommes en effet dans une phase d’assimilation de la réforme, nous allons donc très certainement assister à une vague de regroupement d’études. Ces structures de taille plus importante seront organisées avec des départements qui seront animés par des anciens commissaires-priseurs judiciaires d’une part et par des anciens huissiers d’autre part. Cette distinction des deux anciennes professions disparaîtra lorsque la génération qui suit actuellement la formation de Commissaire de Justice arrivera aux commandes de ces structures.

Charles : Une partie de la profession se questionne chez les commissaires-priseurs parce que, comme le disait Artus, nous avons été formés pour l’amour des objets d'art plus que pour participer à la mise en œuvre des décisions de justice. Pour toute cette nouvelle activité, les commissaires de justice doivent se poser des questions très pratiques d’organisation, de répartition de compétences et appréhender les responsabilités que la réalisation de leurs nouvelles missions implique. Les deux anciennes professions voient dans cette fusion, un risque de concurrence accrue. Pour atténuer cette inquiétude, on peut rappeler que les huissiers avaient déjà la capacité de procéder exceptionnellement à des ventes dans des villes où l’on ne trouvait pas de commissaire-priseur judiciaire. Cette fusion a fait d’une exception une règle.

 

 

 

 

Les missions du commissaire de justice

  • signifier les décisions de justice et les titres en forme exécutoire aux intéressés,
  • exécuter les décisions de justice,
  • organiser des prisées et des ventes aux enchères publiques de meubles corporels ou incorporels  à la suite d’une décision de justice ou imposées par la loi,
  • accomplir les mesures conservatoires après l’ouverture d’une succession,
  • délivrer des titres exécutoires en cas de non-paiement d’un chèque,
  •  procéder au recouvrement des petites créances en suivant la procédure simplifiée,
  • établir des constats d’état des lieux locatifs en cas de litige,
  • vérifier les comptes de tutelle avec l’aide du greffier. 
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