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Michel Jarleton : « Notre spécificité est de participer à la réhabilitation de masse nécessaire en prenant en charge les oubliés de la rénovation. »

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Michel Jarleton : « Notre spécificité est de participer à la réhabilitation de masse nécessaire en prenant en charge les oubliés de la rénovation. »
Michel Jarleton : « Notre spécificité est de participer à la réhabilitation de masse nécessaire en prenant en charge les oubliés de la rénovation. »

Membre de l’UNSFA (Union Nationale des Syndicats Français d’Architectes) depuis vingt ans et actuel vice-président, Michel Jarleton est l'un des experts incontournables du complexe et épineux défi de la rénovation immobilière. Invité d’Onlib’Infos, l’ancien président et fondateur de l’association des Architectes de la Rénovation nous décrypte les enjeux actuels de la réhabilitation, sa place au sein de la profession et ses perspectives pour les années à venir.

Depuis environ cinq ans, l’UNSFA insiste particulièrement sur la rénovation énergétique. Quels en sont les enjeux primordiaux ?

Actuellement, c’est le sujet le plus impactant au niveau du traitement des émissions de carbone, puisque l’on considère que 80 % des logements de la ville de demain sont déjà construits. L’effort à faire est donc bel et bien sur les bâtiments qui sont déjà en place. Bon nombre d’entre eux, notamment ceux construits avant les années 80, sont de véritables passoires thermiques et donc une source d'émissions de gaz à effet de serre. Lorsque l’UNSFA s’est penchée sur le problème, nous avons identifié que le logement comptait parmi les plus gros producteurs de gaz à effet de serre. Contrairement à la croyance commune qui voudrait que cette problématique relève des copropriétés ou des logements sociaux, elle concerne en réalité davantage les ménages car 70 % des logements en France ou assimilés (petites copropriétés avec chauffages individuels).

Les architectes traitent généralement de problématiques liées à la construction neuve. Peut-on dire que la rénovation est une spécialité suffisamment reconnue dans le métier pour attirer de futurs experts ?

Assez rapidement, les architectes ont saisi l’intérêt de la rénovation et ont pris conscience de la nécessité de changer leurs moteurs sans réellement savoir comment s’y prendre. C’est pourquoi nous avons créé une formation, il y a six ans, avec pour objectif de leur montrer quels étaient les impératifs pour qu’ils puissent intervenir sur ces sujets. Nous en avons formé environ 600 en une année. Cette spécialité commence aujourd'hui à être reconnue. Après cette formation, plusieurs architectes éprouvaient le besoin d’aller plus loin et d’échanger entre eux, c’est pourquoi nous avons ensuite créé le concept des « architectes de la rénovation ». Nous regroupons des groupes homogènes dans les territoires, ce qui est important puisqu’il y a un besoin de partager sur les problématiques locales liées à l’habitat en raison des différences géographiques, des modes constructifs et des usages spécifiques.

Pour atteindre les objectifs de 2050 au sujet de la rénovation, il faut réhabiliter 700 000 logements par an. Cela demande de mobiliser beaucoup d’experts de la rénovation. Est-ce atteignable selon vous ?

C’est un défi énorme. De notre côté, les Architectes de la rénovation ont pour ambition de traiter 10 à 15 % maximum de ces 700 000 logements. Cependant, nous qui travaillons beaucoup avec des artisans, nous voyons qu’ils ont déjà du mal à suivre, donc si nous augmentons un peu le rythme, il est certain que ça ne marchera pas. De plus, parmi les 600 architectes que nous avons formés, il y en a 97 qui sont réellement investis dans la rénovation. Nous nous savons attendus par les ménages, qui ont besoin d’avoir un interlocuteur unique pour être correctement pris en main et sommes prêts à relever le défi. Mais pour atteindre cet objectif 2050, je pense qu’il y a de la place pour tout le monde !

Votre nom est souvent associé aux décrets du gouvernement “mon accompagnateur rénov”. Souhaitez-vous que les architectes de la rénovation soient des accompagnateurs ?

Nous avons eu beaucoup de mal sur ce sujet-là avec le gouvernement car nous n’étions pas considérés comme des interlocuteurs essentiels et notre mode de vision ne permettait pas de répondre aux attentes politiques qui ont des temporalités plus courtes. Nous leur avons montré que la création d’un énième interlocuteur, “l’accompagnateur”, risque de ne pas rassurer les ménages. Plus on multiplie les interlocuteurs, plus on fait peser un coût sur l'opération, ce qui peut mettre en péril l’économie du système. Nous leur avons donc expliqué qu’il fallait absolument que l'accompagnateur soit celui qui fait l'opération, car les architectes ne souhaitent pas être accompagnateur s’ils n’ont pas le projet. Or, le gouvernement a besoin d’énormément d’accompagnateurs et s’il ne prend pas en compte ces revendications, je pense que peu d’architectes s’engageront dans l’accompagnement sans réalisation des travaux.
 

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