Indications et précautions d'emploi des SEL et SPFPL
Interfimo, en sa qualité de société de financement spécialisée des Professions Libérales, se doit de porter attention à l’évolution de l’environnement juridique et fiscal de ses clients.
La Loi du 31/12/1990 instituant les sociétés d’exercice libéral (SEL) ne pouvait donc nous laisser indifférents puisqu’elle a entraîné des changements dans les comportements et les stratégies de nombreux professionnels.
La SEL est d’ores et déjà la structure d’exercice de référence chez certaines Professions Libérales telles que les avocats d’affaires, les biologistes, les pharmaciens, les radiologues (et par analogie les experts comptables qui disposent depuis l’après-guerre de SARL et de SA dont les caractéristiques sont proches).
Elle le deviendra inéluctablement chez les officiers ministériels –notamment chez les huissiers de justice et les notaires qui sont restés en marges à ce jour.
Cet engouement s’est d’ailleurs nettement accentué au cours des cinq dernières années et nul doute que les sociétés de participations financières de professions libérales (SPFPL), désormais opérationnelles pour toutes les professions règlementées même en l’absence de décret d’application, vont accélérer cette tendance.
A titre indicatif, plus de 80% des pharmaciens achètent aujourd’hui leurs fonds d’officines sous couvert de SEL.
Il n’est donc pas inutile de rappeler quelques fondamentaux qui caractérisent la SEL, puis de passer en revue ses principaux scénarios d’utilisation chez toutes les Professions Libérales, avant de tenter une réflexion prospective sur l’avenir des SPFPL.
Rappel des fondamentaux
Un mythe et deux caractéristiques expliquent cet engouement.
Tentons d’abord d’éliminer le mythe.
Y aurait-il des économies d’impôts et de charges sociales à réaliser en prélevant le bénéfice d’une activité libérale dans le cadre d’une SEL (sous le régime de l’I.S.), plutôt qu’en nom propre ou en société de personnes (sous le régime de l’I.R.) ?
Il n’en est rien : pour un même excédent d’exploitation, appréhendé directement par un professionnel imposé à l’I.R. (BNC ou pharmacien BIC), ou décomposé en rémunération du travail et en dividendes via une SELARL, les prélèvements fiscaux et sociaux sont extrêmement proches.
Quant aux SELAS et SELAFA, elles sont souvent disqualifiées de ce type de comparatif en raison de leurs surcoûts sociaux –puisque les associés dirigeants ne peuvent échapper au statut de salariés (et aux charges liées) dans ces catégories de SEL, même s’il s’avère possible de revendiquer une double affiliation : au régime général des salariés pour leur activité de dirigeant et au régime des travailleurs non-salarié (TNS) pour leur exercice professionnel.
En revanche les gérants ou co-gérants majoritaires de SELARL peuvent conserver l’économique statut de TNS pour l’ensemble de leur rémunération.
Au sein d’une SEL, il est toujours possible d’optimiser la répartition entre rémunérations et dividendes (sans oublier toutefois que ces derniers ne seront disponibles qu’après la clôture de l’exercice), mais les effets sont minces car l’économie de charges sur la part du bénéfice distribué en dividendes conduira aussi à des prestations retraite réduites dans le futur. En outre, la part des dividendes qui est présumée rémunérer indirectement le travail du dirigeant (au-delà de 10% des fonds propres) est assujettie à l’ensemble des charges sociales.
La situation d’un « gros contribuable BNC/BIC » devient même parfois un peu plus favorable, à revenus équivalents, que celle de l’associé d’une SELARL.
Mais insistons sur le fait que ce genre de comparatif :
- ne conduit pas à des différences significatives,
- reste toujours très provisoire dans l’attente d’une prochaine loi de finances.
Il ne serait donc pas raisonnable de passer en SEL à seule fin d’économiser des impôts et des charges sociales sous le régime de l’I.S, d’autant que la cession ultérieure du cabinet ou de l’officine pourrait s’en trouver compliquée… mais les mythes ont parfois la vie dure.
* * *
En revanche, deux caractéristiques bien réelles et pérennes justifient l’engouement de ceux qui sont en situation d’en tirer parti :
- la SEL est une société d’exercice assujettie à l’I.S.
- la SEL peut accueillir d’autres associés que les professionnels qui exercent en son sein.
En sa qualité de société d’exercice, la SEL est propriétaire du fonds libéral (ou du fonds de commerce pour les pharmaciens) –ce qui suppose que le dit fonds peut lui être apporté, vendu, loué ou mis à disposition… sous réserve des règles déontologiques et des précautions usuelles pour prévenir des abus juridiques ou fiscaux.
Or, chaque fois que la SEL est en situation d’emprunter pour acquérir cet actif incorporel qu’est un fonds libéral ou commercial, l’I.S. s’avère très avantageux.
Cette SEL, qui exerce donc, encaisse le chiffre d’affaires (les honoraires de ses associés et collaborateurs), assume les frais généraux (parmi lesquels figurent les rémunérations des associés exerçant) mais, puisqu’elle est assujettie à l’I.S., elle supporte son propre impôt sur ses bénéfices (15% sur les 38.112 premiers euros, 33,33% sur le solde).
Une fois l’I.S. réglé, les bénéfices de la SEL peuvent avoir trois destinations :
- soit ils sont distribués en dividendes (et l’on revient aux observations ci-dessus : l’économie d’impôts est un mythe),
- soit ils restent en réserves dans la SEL,
- soit ils sont consacrés, par la SEL, à rembourser le capital de ses propres emprunts.
Pour ces deux dernières destinations, la différence de traitement fiscal et social avec les autres sociétés d’exercice au régime de l’I.R. est considérable : dans une SCP dite « fiscalement transparente » (ou une SNC chez les pharmaciens) les associés paient impôts et charges sociales sur les bénéfices, même si ceux-ci sont conservés en réserves ou consacrés à rembourser des emprunts.
Dans une SEL, dès lors que les associés ne touchent pas aux bénéfices, seule la société paie l’impôt (à 15% ou 33,33%) et celui-ci est très faible au regard du taux de prélèvement marginal d’un gros contribuable BNC/BIC (I.R. + C.S.G. + charges sociales déplafonnées… conduisent bien au-delà de 50 % de prélèvements).
En d’autres termes, le régime de l'I.S. ne présente pas d’intérêt fiscal pour des professionnels libéraux désendettés qui entendent prélever l'intégralité du bénéfice (sous forme de rémunération et/ou de dividendes) ; il est en revanche très intéressant pour faire des réserves ou pour financer à crédit des actifs incorporels (sans amortissement fiscal pour compenser les remboursements en capital) : les intérêts sont alors déductibles et les remboursements en capital imposés à 15% ou 33,33%.
Deuxième originalité : la SEL peut associer, aux côtés des praticiens qui y exercent,
- des anciens associés ou leurs ayants droits (temporairement),
- des membres de la même profession –voire des professions de la même famille libérale : santé, juridique, technique (sauf dispositions contraires par décret),
- des tiers dans des limites variables selon les professions (0 chez les pharmaciens, mais de 25% chez les médecins par exemple),
- et, depuis la loi MURCEF (2001), des Sociétés de Participation Financière de Professions Libérales (SPFPL) … qui ne sont rien d’autres que des holdings inscrites à un Ordre.
Cette souplesse, ajoutée au fait que dans certaines Professions les décrets autorisent une même SEL à exploiter plusieurs cabinets, a permis des regroupements, des croisements ou prises de participation, de l’essaimage, la filialisation de certaines activités, la sortie en douceur d’anciens associés… pour les entrepreneurs libéraux qui entendent se développer au-delà de leur pratique personnelle.
Quant à ces nouvelles associées que sont les SPFPL, elles pourront non seulement organiser un groupe de SEL, mais aussi permettre à de jeunes professionnels d’intégrer ou de reprendre des SEL sous couvert de leurs « holdings personnelles », qui porteront les emprunts à leur place.
Cette utilisation de la holding, devenue usuelle en matière de transmission des PME, permet au repreneur de ne pas payer d’impôts sur les dividendes qui lui servent à rembourser son emprunt d’acquisition (voire même, en cas de holdings actives ou « fiscalement intégrées », d’en déduire les intérêts) – une « société mère » (la SPFPL) étant exonérée d’I.S. sur 95% des dividendes perçus de sa « fille » (la SEL).
Pour toutes les professions, la loi de 1990 avait prévu que les associés au sein de la SEL devaient conserver le contrôle en étant majoritaires en droit de vote.
C’est notamment sur ce point que la loi Macron révolutionne le dispositif.
Principaux scénarios d’utilisation de la SEL
Quatre modes d’utilisation se dégagent, mais de manière plus ou moins accentuée selon les Professions, leurs modes d’exercice et le cadre réglementaire et déontologique qu’elles ont adopté (21 décrets d’application de la loi du 31/12/1990 et autant de codes de déontologie ne facilitent pas ce type d’analyse !).
- L’achat d’un actif incorporel coûteux pour s’installer : c’est de manière flagrante ce qui se passe chez les pharmaciens ; avec un apport personnel donné, le jeune pharmacien préfère acheter son officine sous couvert d’une SEL à l’I.S. (en SELARL unipersonnelle ou avec un associé investisseur qui est souvent son ancien patron) pour accéder à un fonds plus important ou mieux placé que celui qu’il aurait pu acquérir en exercice individuel ou via une SNC sous le régime de l’I.R.
- La transmission progressive d’un cabinet à un ou plusieurs associés, appelés à devenir des successeurs : le cabinet est cédé à une SEL qui réunit pendant quelques années les deux générations d’associés ; ce mode de transmission est particulièrement judicieux dans les Professions où l’intuitu personae fait obstacle à une cession du cabinet en bloc par un professionnel qui prend sa retraite.
Chez les avocats, par exemple, il est usuel d’intégrer des collaborateurs qui deviennent des associés, puis des successeurs. L’apport « en nature » du cabinet à une SCP dont les parts étaient rachetées progressivement par la nouvelle génération était le mode opératoire classique. Mais il est souvent bien plus intéressant de créer une SEL qui contractera un emprunt pour financer un apport « à titre onéreux » : ainsi les jeunes associés acquièrent les parts d’une société dont l’actif net est réduit d’autant, et ils n’ont pas besoin d’emprunter eux-mêmes sous le régime fiscal de l’I.R., défavorable pour financer des actifs incorporels.
- Le développement d’entreprises libérales propriétaires de lieux d’exercice multiples : chez les biologistes et les radiologues notamment, l’exercice isolé n’existe plus ; la faculté d’exploiter en SEL, dans le cadre d’une fiscalité d’entreprise, plusieurs laboratoires ou cabinets médicaux et de prendre des participations externes dans d’autres SEL, a reconfiguré ces Professions en quelques années.
Sous la pression des gains de productivité imposés par les mesures d’économie de santé, du coût des équipements et de l’exigence de permanence des soins, les spécialités médicales techniques utilisent massivement des SEL réunissant plusieurs associés ou croisant des participations.
- Le refinancement : ce dernier scénario, à visées patrimoniales et défiscalisantes, est paradoxalement le plus commenté et critiqué, alors qu’il est statistiquement marginal.
Il s’agit pour un professionnel libéral, en cours de carrière, de céder son cabinet à une SEL dont il restera l’associé unique ou très majoritaire –la SEL contractant un emprunt pour cette acquisition. Ce montage permet de financer par un crédit professionnel un arbitrage entre actifs professionnels et privés.
Mais le coût initial de l’opération est élevé (plus values, droits de mutation, frais de constitution), les contraintes de la société de capitaux ne sont pas anodines (fût-elle unipersonnelle) et certains spécialistes estiment que les risques d’une requalification fiscale ne sont pas à exclure (surtout en cas de surévaluation du cabinet).
Il y a donc peu d’opérations de ce type ; à titre indicatif, nous estimons chez INTERFIMO que moins de 10% des SEL pour lesquelles il nous est demandé un financement seraient à ranger dans cette catégorie.
Comparatif SCP – SEL en matière financière
L’intérêt de la fiscalité d’entreprise pour financer l’acquisition d’un actif incorporel, tel qu’un fonds libéral ou un fonds de commerce, est illustré par ces graphiques qui retracent les flux financiers et les bases imposables dans une SCP et dans une SEL – étant présumé que c’est la société qui rembourse l’emprunt.
Les formes d'exercice dans lesquelles les bénéfices sont directement imposés à l'I.R. au niveau des associés, présentent un inconvénient majeur en phase de remboursement d'emprunt :
l'essentiel de la valeur d'un cabinet portant sur des actifs incorporels, seuls les intérêts du crédit d'acquisition sont déductibles (il n'y a pas ou peu d'amortissement d'actifs corporels pour compenser les remboursements en capital) ; la distorsion entre la trésorerie disponible et le revenu imposable s'accentue donc au fil des années
Dans le cadre d'une SEL à l'I.S., les bénéfices mis en réserves ou consacrés au remboursement des emprunts ne supportent qu'un taux d'imposition de 15 % (jusqu'à 38.112€) ou 33,33 % (au-delà de 38.112 €) ; les associés ne payent alors ni impôt sur le revenu (I.R.), ni charges sociales (C.S.), sur cette fraction des bénéfices.
Il s'ensuit, à marge bénéficiaire identique, une capacité de remboursement accrue par rapport à une SCP ou à un exercice individuel –d’autant que le plafond de 38.112 euros pour bénéficier du taux réduit de l’I.S. est rarement ou faiblement dépassé dans la plupart des cabinets, puisqu’il s’entend après rémunérations des associés.
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SPFPL : la nouvelle donne
La Loi MURCEF (2001) avait créé une nouvelle catégorie d’associés dans les SEL : les Sociétés de Participation Financière de Professions Libérales (SPFPL), qui ne sont rien d’autres que des holdings contrôlées par les Ordres professionnels.
Puis, les Lois LME (2008) et de Modernisation des Professions Juridiques (2011) ont amélioré le dispositif afin qu’une holding/SPFPL puisse être majoritaire en capital et en droits de vote dans une SEL, dès lors que cette SPFPL est détenue majoritairement par des PL exerçant dans la SEL.
A ce jour, certaines Professions n’ont toujours pas bénéficié de décrets d’application mais toutes peuvent constituer des SPFPL depuis l’arrêt du C.E. du 28 mars 2012.
Une décision majeure du Conseil d'Etat sur les SPFPL :
Dans un arrêt du 28 mars 2012 le Conseil d'Etat reprochait au gouvernement de méconnaître la volonté du législateur qui a créé les SPFPL en 2001, car celles-ci n’étaient toujours pas opérationnelles pour les Professions de Santé : il enjoignait le Premier Ministre de se prononcer dans un délai de 6 mois "sur la question de savoir s'il est nécessaire de prévoir des règles particulières permettant d'assurer le respect de l'indépendance des membres de chacune de ces professions et des règles déontologiques qui leur sont propres".
Depuis le 1er octobre 2012 les Ordres des Professions de Santé qui ne bénéficient toujours pas de décrets d’application (médecins, chirurgiens dentistes…), acceptent donc d’instruire les dossiers de SPFPL qui leur sont présentés.
Voisi quelques schémas d'organisation pour illustrer l'utilisation des SPFPL dans le monde libéral
La fiscalité des SPFPL ou « holdings de professions libérales »
Désormais les PL qui se constitueront en SPFPL pour reprendre un cabinet ou une officine en SEL pourront donc bénéficier de la fiscalité des sociétés mères/filiales pour l’intégralité de leur montage financier ; c’est à dire que les dividendes versés par la « SEL fille » et consacrés à rembourser l’emprunt de la « SPFPL mère » ne seront quasiment pas imposables –contrairement aux dividendes perçus directement par les personnes physiques qui supportent intégralement les prélèvements sociaux et fiscaux
Mieux encore, lorsque toutes les parts d’une SEL seront cédées en bloc à un ou plusieurs repreneurs, leur SPFPL sera en position d’acquérir 95 % du capital et des droits de vote –seuil qui autorise le régime de l’intégration fiscale ; alors, non seulement les dividendes seront exonérés, mais de plus les intérêts d’emprunt seront déductibles (au titre des frais financiers) des bénéfices réalisés par la « SEL fille ».
Ces intégrations fiscales seront fréquentes par exemple en pharmacie, où il est banal que tout le capital d’une société soit acquis en une fois par un seul acquéreur devant posséder à titre personnel 1 part minimum du capital de la SEL (100% moins 1 part seront donc disponibles pour sa SPFPL).
La capacité de remboursement de l’acquéreur/SPFPL, ainsi majorée de l’ordre de 60% par rapport à celle d’une personne physique, permettra de réduire la durée de l’emprunt ou d’en augmenter le montant.
L’écart entre la situation de l’acquéreur /SPFPL et celle de l’acquéreur/personne physique s’est encore accru, puisque l’économie d’impôt réservée aux repreneurs de sociétés à l’I.S., au titre de leurs intérêts d’emprunt, n’a pas été reconduite dans la Loi de finances pour 2012.
En l’état, la seule possibilité offerte à l’acquéreur/personne physique est de déduire une partie de ses intérêts au titre de ses « frais réels de salarié » : mais ce faisant, il doit abandonner la déduction forfaitaire de 10% au titre de ces mêmes frais et il a généralement plus à y perdre.
Les deux régimes fiscaux des SPFPL
Pour éviter que le même bénéfice soit imposé deux fois, au niveau de la SEL filiale, puis via les dividendes perçus par la holding, il existe deux régimes fiscaux de faveur dans le Code Général des Impôts : le régime des sociétés « mères et filiales » et celui de « l’intégration fiscale ».
- Le régime des sociétés mères/filiales exonère d'impôts la holding sur la quasi-totalité(1) des dividendes qu'elle perçoit, à condition qu'elle détienne au moins 5 % du capital de sa filiale ; ce seuil de 5% peut être gênant, par exemple en biologie où l’entrée d’un associé dans une SEL très importante se matérialisera par une participation initiale inférieure à 5%.
Il faut alors distinguer deux situations, selon les fonctions de la holding :
- Soit la holding n'a pas d'autres ressources que des dividendes (quasiment pas imposables) et elle ne pourra donc pas déduire ses intérêts, à défaut de base imposable : on la qualifie alors généralement de « holding pure ».
- Soit la holding aura des ressources propres imposables, en sus des dividendes, et elle pourra y imputer ses intérêts d'emprunt : ce serait le cas d’une SPFPL « active » facturant à la SEL des prestations en matière de gestion financière, de management, de ressources humaines…
Mais ces prestations devront être avérées sous peine de redressements fiscaux surtout lorsque la SPFPL n’a ni structure, ni personnel.
Théoriquement il est aussi possible qu’une autre société d’exercice fasse fonction de holding: ce n’est donc plus une SPFPL qui est utilisée, mais une SEL exerçant la Profession par ailleurs et qui sert également de structure d’investissement dans une autre SEL.
Cette « SEL-holding » disposerait alors de ressources propres, mais ce montage suppose que les praticiens associés puissent cumuler un exercice professionnel dans les deux structures, ce qui est rarement autorisé par la réglementation des diverses Professions Libérales.
- Le régime de l'intégration fiscale permet de fusionner les résultats de la holding et de la filiale : les intérêts de la holding viennent de facto minorer le bénéfice fiscal de la filiale et les bénéfices servant à rembourser ne sont imposés qu’une fois pour les deux sociétés.
Le Code Général des Impôts pose notamment comme condition à l’intégration fiscale que la holding détienne au moins 95 % du capital et des droits de vote de sa filiale.
C’est désormais possible puisque la loi LME a modifié l’article 5 de la loi 90-1258 du 31/12/1990, en permettant aux SPFPL d’être majoritaires lorsqu’elles sont détenues par des professionnels en exercice dans les SEL.
A noter qu’une disposition spécifique aux montages d’intégration fiscale couramment intitulée « l’amendement CHARASSE », limite en pratique la déduction des intérêts dans le cadre d’une « vente à soi-même ».
L’avantage financier d’une holding est de ne quasiment pas payer d’impôt sur les dividendes qui sont consacrés à rembourser l’emprunt d’acquisition d’une société.
Un avantage supplémentaire liée à la déduction des intérêts, dont peuvent profiter les holdings « actives » ou « fiscalement intégrées », améliore encore le dispositif.
Déduire ou ne pas déduire ses intérêts d’emprunt pour l’acquisition de parts de SEL… là n’est pas la question !
Bon nombre de commentateurs, y compris au cours des débats parlementaires, ont salué avec les SPFPL l’opportunité pour les professionnels libéraux de déduire les intérêts des emprunts nécessaires à l’acquisition de leurs pars de SEL.
Nous pensons que c’est une approche un peu superficielle, d’autant que le niveau actuel des taux d’intérêt est très faible et que leur déductibilité fiscale n’est pas un enjeu majeur pour améliorer la capacité d’emprunt.
Le vrai sujet c’est le niveau des prélèvements fiscaux et sociaux sur les bénéfices de l’entreprise qui permettront in fine de rembourser l’emprunt d’acquisition.
Le graphique ci-dessous illustre cette analyse :
- le professionnel libéral qui acquiert un fonds via une SEL ne disposera pas personnellement des bénéfices destinés à rembourser l’emprunt : il ne payera donc ni impôts, ni charges sociales sur ces sommes ; seul un IS au taux maximum de 33,33% sera à la charge de la SEL
- mais, de même, le professionnel libéral qui créé une SPFPL pour acquérir (ultérieurement pour hypothèse) des parts de cette SEL ne paiera pas non plus d’impôts ou de charges sociales sur les bénéfices qui rembourseront l’emprunt de sa SPFPL –puisque celle-ci n’est pas imposable sur les dividendes qu’elle perçoit.
En pratique dans ces deux scénarios le seul prélèvement est celui de l’I.S. au niveau de la SEL
(1) 5 % des dividendes restent imposables pour « frais et charges » mais ils sont effacés par la déductibilité d’une (faible) partie des intérêts
SPFPL et ISF
La question se pose de savoir si la qualification de bien professionnel exonéré d’ISF, qui vaut pour la détention directe de parts de SEL, s’étend à leur détention indirecte via une SPFPL.
Rappelons d’abord que seuls les associés exerçant au sein de la SEL peuvent bénéficier de cette exonération d’ISF et que, contrairement au régime commun, les PL qui détiennent moins de 25% du capital de leur SEL sont aussi exonérés sur la base d’une tolérance administrative.
Dans l’attente de précisions de l’administration, à partir de la doctrine en vigueur, on peut présumer que la détention via une SPFPL « holding pure » bénéficiera aussi de l’exonération, dès lors qu’il n’y aura qu’un seul niveau d’interposition entre le PL et sa SEL.
Quant à la SPFPL « holding active », l’exonération d’ISF découle précisément de son activité propre
SPFPL et TVA
Une SPFPL « holding pure » échappe à la TVA ; en revanche une SPFPL « active » y sera assujettie, en proportion de ses activités propres facturées à sa (ses) filiale(s) SEL.
C’est un paramètre à intégrer pour les professionnels libéraux non assujettis, qui ne pourront donc récupérer ladite TVA majorant les factures de leur SPFPL à leur SEL.
A contrario, le non assujettissement d’une SPFPL « holding pure » privera les professionnels libéraux assujettis (pharmaciens notamment) de récupérer la TVA majorant les honoraires et commissions d’acquisition à la charge de la holding lorsqu’une SPFPL acquiert une SEL.
SPFPL et plus-values de cession sur ses titres de participation dans une SEL
Une SPFPL qui cède sa participation dans une SEL bénéficie d’un régime d’imposition particulièrement favorable : en effet ses plus-values font l’objet d’une imposition séparée au taux zéro, à l’exception de la réintégration au résultat imposable d’une quote-part de frais et charges de 12% -cela conduit à un taux effectif d’imposition de 4% environ
L’Administration se réserve de vérifier que cette participation était durable et utile à la SPFPL –ce qui ne fait généralement pas de doute.
SPFPL et dissolution précipitée
A contrario, un risque de dissolution précipitée pèse sur la SPFPL qui cède ses titres de participation et ne réinvestirait pas rapidement dans une autre SEL (scénario banal du pharmacien qui change d’officine en cours de carrière) : pour les pharmaciens et les biologistes, le Code de la Santé précise en effet que la SPFPL doit alors être radiée –ce qui conduirait à une dissolution catastrophique sur le plan fiscal (distribution de l’actif aux associés).
Idem pour la SPFPL détenant la SEL d’un professionnel libéral qui cède pour partir en retraite : le changement d’objet social d’une SPFPL qui vendrait ses parts de SEL et serait transformée en « holding familiale » pourrait entraîner les conséquences fiscales d’une dissolution.
Des parades sont imaginables, mais relèvent de fiscalistes avertis.
SPFPL et transmission familiale
L’interposition d’une SPFPL permet la transmission d’une SEL au seul « enfant PL » sous le régime fiscal très attractif du pacte DUTREIL (75% d’exonération) : c’est la SPFPL qui prend en charge, à l’aide d’un crédit, la soulte due à ses frères et sœurs dans le cadre d’une donation-partage.
En pratique un professionnel libéral peut être confronté à 5 scénarios usuels pour acquérir un actif incorporel :
Le fonds ou la société sont à l’I.R.
Il acquiert un fonds libéral, une pharmacie ou des parts de SCP ou de SNC et il reste lui-même au régime de l’I.R. (BNC ou BIC)
Il constitue une SEL à l’I.S. pour acquérir un fonds ou, selon un schéma d’association qui tend à se développer, il s’associe avec son vendeur dans le cadre d’une SEL qui rachète le cabinet ou l’officine du vendeur.
Le fonds est à l’actif d’une SEL à l’I.S.
Il acquiert une participation et, soit il déduit ses intérêts de sa rémunération fort de la jurisprudence CE 2004, soit il opte pour un abattement forfaitaire de 10% sur sa rémunération (généralement plus favorable).
Il acquiert sa participation sous couvert d’une SPFPL sous le régime mère-filiale, qui porte son emprunt.
Il acquiert ≥ 95 % de la SEL et peut ainsi constituer une holding « fiscalement intégrée », ou il acquiert sa participation via une holding active ou une autre SEL.
Supposons qu’il aspire dans tous les cas à un revenu net, impôts et charges sociales payés de 70.000 euros.
L’actif incorporel, fonds ou participation, produit un chiffre d’affaires de 500.000 euros et une rentabilité de 170.000 euros.
Le tableau ci-dessous établit sa capacité d’endettement pour chaque cas de figure.
L’avantage important que procurent les deux meilleurs scénarios :
l’acquisition du fonds par une SEL,
l’acquisition des parts d’une SEL par une SPFPL fiscalement intégrée ou active,
nous inspire deux commentaires :
chez les Professions où l’incorporel est fortement patrimonialisé, l’essor de la SEL est irréversible,
la SPFPL est un instrument urgent et indispensable pour assurer la fluidité des transmissions entre professionnels libéraux dès lors qu’ils se seront massivement organisés en SEL.
